Par une ordonnance du 8 février 2023 le premier président de la Cour d'appel de Colmar vient de rappeler les différentes conditions permettant d'ordonner l'arrêt de l'exécution provisoire d'une décision de première instance et apportent des précisions quant à la condition relative aux "conséquences manifestement excessives" en cas d'exécution de celle-ci. Pour rappel, l'entrée en vigueur du décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019 a instauré le principe de l'exécution provisoire des décisions rendues en première instance, sauf si la loi en dispose autrement ou à moins que le juge de première instance n'écarte l'exécution provisoire.
En l'espèce, une société avait pris en location un local aux termes d'un bail commercial auprès d'un propriétaire, ce dernier lui ayant notifié la résiliation du contrat de bail lors d'un rendez-vous, résiliation confirmée par écrit par la suite. Les serrures des locaux loués ont ensuite été changées. La locataire a alors tenté d'obtenir une ordonnance de référé pour accéder aux locaux loués, mais le président du tribunal judiciaire statuant en matière de référé d'heure à heure, a décidé qu'il n'y avait pas lieu à référé en considérant que la question de l’existence de l’obligation de délivrance des locaux excédait ses pouvoirs.
La société a alors intenté une action au fond devant le Tribunal judiciaire de Strasbourg contre le propriétaire aux fins d'obtenir la nullité de la résiliation du bail et l'évacuation des locaux ainsi que le changement de serrure. La juridiction de première instance a constaté la nullité du congé, tout en faisant droit à la demande reconventionnelle du propriétaire à la condamnation de la société à payer les loyers dus pour la période en litige. Le tribunal judiciaire a cependant débouté la société de ses prétentions concernant la prise de possession des locaux.
Le propriétaire a interjeté appel de cette décision devant le Cour d'appel de Colmar, mais la juridiction de première instance n'ayant pas écarté l'exécution provisoire de droit du jugement rendu, il a saisi le premier président de la Cour d'appel de Colmar sur le fondement de l'article 514-3 du code de procédure civile, pour solliciter l'arrêt de l'exécution provisoire - ou autrement dit, la suspension de l'exécution provisoire - jusqu'à ce qu'il soit statuer au fond sur l'appel.
Ce texte codifié par le décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019, permet à l'appelant d'obtenir l'arrêt de l'exécution provisoire à condition de démontrer d'une part, qu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation de la décision de première instance et d'autre part, que l'exécution de cette décision risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives. Il s'agit de conditions cumulatives auxquelles s'ajoute une condition de recevabilité de cette demande : la question de l'exécution provisoire de la décision rendue en première instance doit avoir été débattue en première instance ou à tout le moins, il faut que l'appelant ait demandé que l'exécution provisoire de droit de cette décision soit écartée devant le juge de première instance.
Dans le cas contraire, la demande devant le premier président de la cour d'appel sera déclarée irrecevable, sauf si (exception de l'exception) les "conséquences manifestement excessives" au sens de l'article 514-3 du code de procédure civile, qui pourraient résulter de l'exécution de la décision de première instance, se sont révélées postérieurement à cette décision.
Dans cette affaire, le premier président rejette la demande de suspension de l'exécution provisoire de la décision de première instance en considérant que le propriétaire n’établit pas l’existence de conséquences manifestement excessives au sens de l’article 514-3 du code de procédure civile. Le premier président reproche notamment au propriétaire de ne pas avoir évoqué sa situation financière, ni produit aucun justificatif de revenus, pour démontrer que ses facultés de paiement ne lui permettraient pas de faire face aux conséquences financières pouvant résulter de l'exécution de la décision de première instance.
Le premier président de la Cour d'appel rappelle donc que les éventuelles "conséquences manifestement excessives" pouvant résulter de l'exécution de la décision dont est interjeté appel au fond - et notamment lorsque ces conséquences invoquées par l'appelant sont de nature financière - ne peuvent être caractérisées qu'à la condition que l'appelant démontre que ses facultés de paiement ne lui permettraient pas de faire face aux conséquences financières de l'exécution provisoire de la décision.
Autrement dit, la caractérisation des conséquences manifestement excessives qui sont de nature financières, suppose un examen in concreto de la situation financière de l'appelant qui demande la suspension, leur caractère "excessif" ne pouvant être simplement objectif.
A propos de Maître CHAVKHALOV
Vous êtes agent de sécurité et avez des difficultés avec le CNAPS ? En tant qu’avocat expérimenté en droit de la sécurité privée, j’accompagne les professionnels de ce secteur dans leurs recours et démarches face au CNAPS. Que ce soit pour contester une décision ou obtenir des conseils personnalisés, je suis là pour défendre vos droits. N'hésitez pas à me contacter pour un accompagnement adapté à votre situation.
67 rue Boecklin
67000 STRASBOURG
Case ordre 362
SELARL AVOCAT CHAVKHALOV