Par un jugement du 23 décembre 2023, le Tribunal administratif de Pau a mis en évidence l'importance de ne jamais admettre la réalité des faits ayant fondé des mises en cause pénales suivies d'une inscription dans le fichier du Traitement des Antécédents Judiciaires (TAJ).
Dans cette affaire, le CNAPS avait refusé l'autorisation préalable à une formation d'agent privé de sécurité à un pétitionnaire en raison de plusieurs mentions le concernant dans le TAJ. Le refus avait été contesté par l'intéressé, d'abord devant la CNAC, puis devant le Tribunal administratif. Il convient de rappeler qu'à la suite de la réforme de 2022, la CNAC (Commission nationale d’agrément et de contrôle) et les CLAC (Commissions locales d’agrément et de contrôle) n'existent plus, y compris pour le recours administratif préalable obligatoire.
Le Tribunal administratif de Pau annule la délibération de la CNAC en considérant que "s'il ressort des pièces du dossier que M. B a fait l’objet de deux mentions au fichier du traitement des antécédents judiciaires dans le cadre de procédures pour les faits précédemment rappelés, le CNAPS n’apporte toutefois aucun élément circonstancié de nature à les caractériser alors qu’ils n’ont fait l’objet d’aucune condamnation et que M. B conteste les avoir commis. Dans ces conditions, le CNAPS ne met pas le tribunal en mesure d’en apprécier la matérialité, alors qu’au demeurant, les mentions sur ce fichier ont fait l’objet d’un effacement postérieurement à la délibération attaquée. Dès lors, il y a lieu de regarder les deux motifs opposés par la CNAC comme étant entachés d’une erreur de fait".
Deux points importants sont à souligner s'agissant de cette décision : 1) il ne faut jamais admettre de quelque manière que ce soit la réalité des faits ayant pour origine les mises en cause pénales inscrites dans le TAJ et 2) c'est le CNAPS qui doit apporter des éléments circonstanciés permettant de considérer que les faits à l'origine de la mise en cause sont établis.
1) Ne jamais reconnaître les faits !
Lorsque vous solliciter la délivrance d'une autorisation préalable, d'une carte professionnelle ou d'un agrément dirigeant au CNAPS, celui-ci consulte, par l'intermédiaire de ses agents habilités, les informations vous concernant dans le TAJ. Si par malheur, des mentions y figurent, les occasions ne vous manqueront pas de commettre l'irréparable en reconnaissant les faits à l'origine de ces mentions. Evidemment, ce dont on parle ici, ce sont les mises en cause dont les procédures ont été classées sans suite sans aucune condamnation pénale.
Avant de vous notifier une quelconque décision de refus, le CNAPS a l'obligation de vous inviter à présenter vos observations sur les résultat de l'enquête administrative vous concernant, ayant abouti à la découverte par celui-ci de vos mises en cause pénales. S'il ne le fait pas, sa décision peut être annulée par le juge administratif pour vice de procédure et notamment le non respect de la procédure préalable contradictoire. A cette occasion, il ne faut surtout pas être ambigu sur la contestation des faits à l'origine des mises en cause qui vous concernent. Evitez par exemple d'évoquer des "excuses" ou le "pardon", puisqu'il peut être considéré que par ces locutions, vous reconnaissez avoir commis les faits.
Il en va de même, si vous décidez après la notification du refus, d'adresser un recours gracieux au Directeur du CNAPS. Là encore, on rappellera qu'il n'est pas obligatoire de le faire, comme ce fut le cas pour les recours adressés à la CNAC. A l'occasion de ce recours facultatif, il faut également fermement contester la matérialité des faits qui vous sont reprochés et il en vaudra de même pour le recours déposé devant le juge administratif.
2) C'est au CNAPS d'apporter les éléments permettant de considérer que les faits sont établis !
Dans le cadre de la consultation du TAJ, le CNAPS n'a en général pas connaissance de l'issue des procédures inscrites dans ce fichier. Rien ne l'empêche cependant de demander des informations complémentaires au bureau d'ordre pénal ayant eu à traiter de ces procédures. S'il ne le fait pas, cela ne constitue pas une irrégularité. En revanche, tout comme dans le jugement commenté, il lui sera reproché de ne pas apporter les éléments permettant de considérer que les faits à l'origine des mises en cause sont établis. Si à aucun moment de la procédure, soit depuis le courrier du CNAPS vous demandant vos observations, jusqu'au recours déposé devant le Tribunal administratif, vous n'avez reconnu la réalité des faits à l'origine des mentions dans le TAJ, le juge administratif peut considérer que les faits ne sont pas établis et ainsi, annuler la décision de refus que vous attaquez.
C'est précisément ce que relève le Tribunal administratif de Pau dans le jugement commenté, puisqu'il semble que le CNAPS n'a apporté aucune information sur l'issue des procédures. A savoir également que, les mentions dans le TAJ avaient été effacées postérieurement à la délibération de la CNAC attaquée. La juridiction a tenu compte non pas de l'effacement en lui-même, puisqu'il est intervenu après la décision du CNAPS et dès lors qu'en la matière le juge statue à la date de la décision attaquée, mais plutôt de l'impossibilité d'établir la réalité des faits à l'origine de la mise en cause, ayant fondé la décision de refus de l'autorisation préalable.
Enfin, j'émets également des réserves sur la portée de ce jugement, puisque jusqu'à maintenant, la jurisprudence admettait la légalité des décisions du CNAPS dès lors qu'il existait des mentions dans le TAJ, sauf à démontrer pour le requérant, que ces faits n'étaient pas avérés. Nous verrons donc si le jugement est confirmé en appel, à condition bien sûr que le CNAPS saisisse la cour administrative d'appel de Bordeaux.
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